Les débutants

Les débutants

Extrait

(Mercure de France, 2011)

« Fin septembre, ils décidèrent de se voir à Bordeaux pour en avoir le cœur net. Il n’en pouvait plus de dormir si peu depuis un mois et d’être si perturbé dans son travail ; elle n’en pouvait plus d’être obsédée par lui sans pouvoir vérifier si elle rêvait ou non. Rendez-vous fut pris, avec beaucoup d’inquiétude et de timidité. Jusqu’au dernier moment il espéra qu’elle ne viendrait pas ; jusqu’au dernier moment elle redouta de tomber sur un homme qui ne lui rappellerait que de très loin le Thomas qu’elle avait si passionnément aimé surtout depuis qu’il avait quitté Sorge. Elle prit le train un peu comme on se rend chez le dentiste : il fallait en passer par là, se faire une idée, ensuite on aviserait ». 

« On peut échapper à l’amour fou et sa tourmente : il suffit de dire non ». En août 2002, Anna Lore tombe follement amoureuse de Thomas Lenz alors que depuis vingt ans elle vit pleinement heureuse avec Guillaume Ruys. Elle aimerait ne pas ressentir cette déchirure, ne pas affronter ce dilemme, et « en femme païenne », aimer ces deux hommes sans avoir à choisir : une demande qu’ils n’acceptent ni l’un ni l’autre. 

« Que c’est étrange de quitter quelqu’un que l’on aime pour quelqu’un que l’on aime. On passe par une passerelle qui n’a pas de nom ». Guillaume, solaire, jupitérien, Thomas, sombre, retenu, sont comme « l’avers » et « le revers » d’une même médaille. Le premier entraînait Anna dans d’énergiques marches en montagne. Le second lui évoque des figures littéraires, notamment celle de Jude l’Obscur de Thomas Hardy. En lui, elle reconnaît des blessures d’enfance, la présence de morts aimés (…) Entre précipices et sommets, tragédie et joie, c’est une prodigieuse enquête sur l’amour ». 

Le Monde, Monique Pétillon, 28/10/2011

« Le sujet n’est rien, rappelait Proust, ce qui compte, c’est « la manière de sentir ». Et la manière de sentir propre à Anne Serre entraîne dans le labyrinthe intérieur où s’engagent ses trois personnages ». 

La Croix, Francine de Martinoir, 8/09/2011