Au secours

Au secours

Extrait

(Champ Vallon, 1998)

« Non, je ne sentais pas exactement de tendresse pour elle. Plutôt une grande curiosité et le désir de m’affronter à elle, de jouer un jeu dangereux. Je sentais qu’elle pouvait faire de moi quelqu’un d’autre, de nouveau, dont je ne soupçonnais même pas les caractéristiques. Elle était capable de me retourner comme un gant, moi pas. Elle, elle ne changerait pas, elle était immuable. C’est agréable d’avoir une mère immuable. C’est comme l’arbre d’un jardin ». 

« La narratrice, qui vient d’acheter une île où se situe sa maison, entreprend de répondre à l’injonction d’une amie de venir la rejoindre. Mais ce départ plusieurs fois différé par des présences ou des visites sur l’île, réelles ou imaginaires, est plusieurs fois avorté, puis il se transforme en simple promenade, et bientôt, quel qu’en soit le prétexte, aucun voyage n’aboutit à son terme (…) On retrouve l’univers sensoriel et enchanteur de l’auteur, l’attirance pour la promenade, mais ce qui frappe avant tout, c’est le style. « Je me dis que si je ne cessais de lui parler, elle ne mourrait pas. On voit cela dans certains films : il ne faut surtout pas que les gens s’endorment. On leur parle pour les maintenir à la lisière de la mort, c’est à dire en vie ». Et c’est bien à cette lisière-là, qu’Anne Serre bâtit son œuvre ». 

Le Temps, Philippe Camand, 1998.

« Peu importe qu’il y ait, dans les événements qui jalonnent l’attente, de l’aberrant, de l’inexplicable : tout nourrit le monologue où se succèdent arguments, interpellations désinvoltes, interrogations, traits d’ironie. La narratrice s’abandonne à son imagination et pour persuader, use de tous les tons. C’est un époustouflant exercice de style ». 

Le Monde, Monique Pétillon, 15/5/1998